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2021 comme 2020 pour le Niger et la Force Barkhane?

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Le sergent Yvonne Huyuh et le brigadier Loïc Risser, tombés au front

Les terroristes font toujours mal

2020, c’était les attaques terroristes, notamment dans la bande sahélo-saharienne où se sont sanctuarisés, les djihadistes et autres bandits de tout acabit, aux côtés de la secte islamiste Boko Haram. Malgré la détermination des armées locales qui, pourtant, peuvent peu avec les moyens qui sont les leurs, les efforts d’un G5 Sahel qui demeure à l’état embryonnaire, sans moyens financiers et logistiques, et surtout les raids de la force française Barkhane, dont la lutte contre le terrorisme est la raison d’être, la nébuleuse, comme une hydre dont les têtes repoussent, aussitôt coupées, endeuille au quotidien, les populations civiles et militaires.

2021 commence comme a fini 2020, pour le Niger et Barkhane

Pays meurtri par ces attaques meurtrières récurrentes, le Niger, pleure, de nouveau, une centaine de ses citoyens, massacrés, en ce début d’année, dans les villages de Tchombangou et de Zaroumdareye, dans deux attaques attribuées aux forces du mal. Barkhane qui vient de perdre, lundi 28 décembre 2020, et ce samedi 2 janvier, cinq jeunes soldats dans la zone dangereuse dite des «trois frontières», s’étendant entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger, et dans la région de Ménaka, au Mali, accule, pourtant, les djihadistes, dans leurs derniers retranchements. Dorian Issakhanian, Tanerii Mauri et Quentin Pauchet, tombés dans la zone des Trois Frontières n’avaient que, 21, 23 et 28 ans. Comme le sergent Yvonne Huyuh et le brigadier Loïc Risser, ils étaient si jeunes, lorsqu’ils quittaient ce monde d’atrocités, portant ainsi à 55, la liste des soldats français morts au Sahel, depuis 2013. Avec le sang versé des populations et des nombreux frères d’arme africains des cinq dernières victimes françaises, et la détresse des millions de déplacés pour cause de terrorisme dans le Sahel, l’Afrique, est sans doute pressée de tourner pour de bon, la page 2020.

Et voici le Covid-19!

«Walaye, cette année 2020 nous a enterrés», jure le boutiquier du coin de rue, regardant avec un mixage d’amertume, d’inquiétude, et de désillusion, les marchandises diverses, amoncelées devant lui et qui s’écoulent à compte-goutte, les clients demeurant rares. «Introuvables même», peste le commerçant, égrenant, sans arrêt, son chapelet dont il triturait, certainement sans s’en rendre compte, le même grain. Son fils, qui, pour prêter main forte à son père en cette fin d’année, synonyme d’affaires prospères, a mis en pause son incessant tour des entreprises, à la recherche d’emploi, assena, lui, que 2020, ne figurera pas sur son CV! Aucune société n’a daigné prendre le risque d’embaucher en ces moments difficiles où toutes les activités tournaient au ralenti, quand elles ne sont pas à l’arrêt. «Rien ne marche», affirme la deuxième cliente de passage, comme pour rassurer les deux plaignants qu’ils ne constituent pas des cas isolés. La faute à qui? Au coronavirus, évidemment, répliquèrent-ils presqu’en cœur. Le Covid-19! Le virus à couronne, venu de nulle part, en novembre 2019, entre bilans de l’année en cours d’épuisement et perspectives pour celle qui arrivait.

Le petit virus ravageur

Très vite, la maladie, devenue pandémique, fait le tour du monde, sans passeport, ne connaissant ni frontière, ni aucune autre restriction. Pire ou mieux, c’est selon, il ne fait aucune différence entre stars de cinéma, de musique, de sport, encore moins gouvernants, même ceux des pays dits puissants. De l’Américain Donald Trump, au Français Emmanuel Macron, sans oublier le Britannique Boris Johnson ou le Brésilien Jair Messias Bolsonaro, tous ont trinqué. Pour une fois, tous les hommes étaient véritablement égaux, certes pas devant la loi, mais un tout petit virus, qui a mis la planète entière au pas, imposant des gestes barrière et des confinements. Pour la première fois également, les Africains, malmenés par la pauvreté et constamment endeuillés par le paludisme et le VIH Sida, sont les moins touchés par un fléau. Alors que les plus grands experts lui prédisaient l’hécatombe, le continent noir ne s’est pas transformé en cimetière géant pour malades du Covid-19.

Le miracle africain

Par miracle, peut-on dire sans risque de se tromper, l’Afrique s’en sort, car le lavage des mains, le port constant du masque, ou la distanciation physique, sont le cadet des soucis des Africains. Mode de vie communautaire oblige, les campagnes électorales et les élections elles-mêmes se multipliant, sans oublier les contraintes du secteur informel qui faisaient barrière aux gestes…barrière, sous les tropiques où les centres de santé manquent de tout, parfois du simple paracétamol, l’inquiétude était grande. Mais, les conditions climatiques dominées par la forte chaleur, la grande jeunesse de la population et les premières mesures de fermeture des frontières aériennes, terrestres et maritimes, ont contribué à sauver les meubles. Et même en l’absence de médicament et de tout vaccin, pour lesquels les Occidentaux ont, aujourd’hui l’embarras du choix, les Africains, eux, ne paniquent pas, outre mesure, face aux menaces de «cette simple grippe» contre laquelle chacun y va de son remède, du piment, au gingembre, en passant par les feuilles de neem, et des potions miracles plus officielles, comme le Covids-Organics malgache. Mais en attendant le vaccin, qui risque bien d’être hors prix pour les Africains, et face à la résurgence de la maladie sur le continent et ailleurs dans le monde, les autorités ont remis au goût du jour, le respect des gestes barrière, car plus tard risque d’être trop tard!

 

La démocratie à deux tons en Afrique

2020, sur le plan démocratique n’a pas, non plus, été une des années les plus roses pour le continent noir. Malgré quelques éclaircies, notamment au Niger où le président Mahamadou Issoufou, au terme de son second mandat constitutionnel a décidé d’organiser des élections auxquelles il n’a pas pris part, la grisaille est bien épaisse, entretenue par les troisièmes mandats anticonstitutionnels de l’Ivoirien Alassane Dramane Ouattara (78 ans) et du Guinéen Alpha Condé (82 ans). Des élections largement contestées qui ont mis en lambeaux le tissu social de ces pays et ont fait couler beaucoup de sang, plus que le coup d’Etat militaire qui a chassé du pouvoir, le Malien Ibrahim Boubacar Kéïta, le 18 août dernier, après la fronde de plusieurs mois, menée par le M5-RFP, de l’influent imam Mahmoud Dicko.

Les journalistes toujours dans l’oeil du cyclone

Une année difficile, 2020 l’aura également été pour les journalistes qui ont été tués, embastillés ou régulièrement agressés physiquement ou moralement, alors qu’ils accomplissaient le noble sacerdoce d’informer. Selon Reporters sans frontières (RSF), dans la seule année 2020, près de 400 journalistes ont été emprisonnés et 50 autres ont été tués, et ce, malgré la réduction, à cause de la pandémie du Covid-19, des couvertures médiatiques de guerres et autres théâtres de violences. De quoi agiter encore un peu plus, le repos éternel que méritent Ghislaine Dupont et Claude Verlon, les deux confrères refroidis dans le sable chaud de Kidal au Mali, le 2 novembre 2013.

En tout cas, bien qu’ignorant tout de ce qu’elle apporte, on ne peut qu’espérer que 2021 soit une année de paix et de justice sociale. Et qu’elle panse, surtout, les plaies ouvertes par 2020!

Par Wakat Séra