Accueil A la une Lutte antiterroriste: le Burkina manque de « stratégie », selon un expert en sécurité

Lutte antiterroriste: le Burkina manque de « stratégie », selon un expert en sécurité

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Des Forces de défense et de sécurité burkinabè sur le terrain des opérations (Ph d'archives)

Confronté depuis janvier 2016 à la lutte contre le terrorisme, le Burkina Faso manque de « stratégie », selon Mahamadou Sawadogo, expert en sécurité sur la télévision privée BF1. Le spécialiste de l’extrémisme violent dans le Sahel a regretté que les pays du G5 Sahel continuent dans cette lutte « à être dans l’action-réaction ».

« Il manque réellement de stratégie. On ne peut pas continuer à être dans l’action-réaction. Si vous observez, l’ensemble des Etats du G5 Sahel sont dans l’action-réaction. Ils ne sont pas dans l’anticipation », a dit l’expert, ajoutant que « les groupes terroristes ont imprimé un rythme que suivent les Etats alors que ça devait être le contraire ». Pour lui, tant que les pays sahéliens notamment le Burkina Faso vont « continuer à suivre le rythme imprimé par ces groupes terroristes-là, nous allons tout le temps constater les dégâts ».

C’est pourquoi, il pense qu’« il est temps de reconstruire, de repartir à la base pour mettre en place une stratégie adoptée et qui est en fonction de la menace. Et c’est une stratégie qui sera sans doute changeante parce que la menace, elle, est mouvante ».

Mahamadou Sawadogo burkinabè, expert en sécurité

Le spécialiste de l’extrémisme violent dans le Sahel a fait remarquer que depuis 2016 jusqu’à nos jours, l’action des groupes terroristes « s’est adaptée à la réponse étatique. Et quand vous observez, leur mode opératoire a évolué ». Selon ses constats, on « assiste de moins en moins à des attaques Kamikazes. Les forces régulières font face désormais à des combattants, à des gens qui disparaissent au sein des communautés, qui s’intègrent au sein de la communauté ». Les terroristes qui écument les zones au niveau du Burkina « font maintenant ce qu’on appelle le terrorisme communautaire. C’est-à-dire qu’ils s’intègrent au sein de la communauté et ils distillent leurs messages radicaux », a défini Mahamadou Sawadogo.

Pour soutenir son observation, il a signifié qu’« au Sahel par exemple vous n’avez plus de leader religieux ni politique parce que les terroristes ont compris que pour faire passer leur message, il faut d’abord éliminer ceux qui peuvent faire barrière à leurs messages radicaux ». C’est pourquoi, ces assaillants « ont pris le soin d’éliminer les leaders-là. Et maintenant c’est plus facile pour eux de rallier les populations dans les zones où ils sévissent à leur cause », a-t-il ajouté, en insistant qu’« un pays qui marche sans stratégie dans une lutte asymétrique ne peut pas voir le bout tunnel » même après plusieurs années de combats.

Pourtant le Burkina avait « l’avantage » mais il « ne l’a su exploiter au maximum », a-t-il formulé avec véhémence. Il s’agit du cas Mali, a laissé entendre l’expert. « J’ai toujours dis que le Mali est un laboratoire à ciel ouvert pour le Burkina. Le Mali devait nous servir d’exemple. Malheureusement, nous n’avons pas su écouter ni observer et tout ce qui se passe au Mali, se répète exactement ici », a-t-il regretté avant de terminer que « je prie Dieu que notre situation ne ressemble à celle du Mali et que le Burkina ne soit pas une terre où toutes les armées viendront se retrouver alors qu’on n’a pas la réponse appropriée » pour les bouter hors du territoire.

Par Bernard BOUGOUM