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Niger: où sont passés les militaires?

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Des soldats en action (Ph. Alamy pour illustration)

Au moins 69 civils, dont le maire de Banibangou, ont été lâchement tués, ce mardi, non loin du village d’Adab Dab, dans un traquenard monté par les fameux et sinistres Hommes armés non identifiés (HANI). Si l’attaque n’a pas été revendiquée jusqu’au moment où nous tracions ses lignes, il faut dire que la région de Tillabéri, située dans l’ouest du Niger, dans la zone dite des Trois frontières, partagée par ce pays, le Mali et le Burkina Faso, fait face aux assauts répétés et meurtriers des djihadistes. Plus féroces, les éléments de l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS), dont le chef, Abou Walid Adnan al-Sahraoui a été neutralisé, entre juin et juillet derniers, par la force française Barkhane et ceux du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) de Iyad Ag Ghali, en ont fait un théâtre de la mort, où ils endeuillent, sans distinction, les Forces de défense et de sécurité et les populations civiles. D’ailleurs, ce sont les combattants de l’EIGS, lourdement armés qui s’en seraient pris à ce convoi de plus de 80 hommes, constitués en comités de vigilance face à la recrudescence des attaques terroristes. Le gouvernement nigérien, qui n’a communiqué officiellement sur cette tuerie en masse que ce jeudi, a décrété un deuil de 48 heures, à compter de ce vendredi.

Le Niger qui a opté de rester debout, malgré les coups funestes que lui assènent les hommes sans foi ni loi, mélange odieux de djihadistes et de malandrins, a pris son destin en main, réussissant même à ramener dans leurs villages, villes et communes d’origine, des populations qui avaient fui les régions martyres de Diffa et de Tillaberi. Ce qui n’est sans doute pas pour plaire à des terroristes qui se sont lancés dans des représailles sanglantes. C’est la preuve que les autorités et les populations nigériennes, mènent le bon combat. Mais en ont-ils tous les atouts?

Rien n’est moins sûr, car la puissance de feu des assaillants et leur réseau d’informateurs font souvent la différence, leur donnant toujours une longueur d’avance sur une armée nationale qui doit davantage se mobiliser pour la défense du territoire nationale. La seule cible à viser, et bien viser, c’est l’ennemi commun qui n’est autre que le terrorisme qui lui ne fait pas dans la dentelle, dans ses actions qui n’épargnent ni militaires, ni civils. L’armée, dans un élan unitaire qui fait fi de toute considération liée au clan, à l’ethnie, ou d’attachement à un individu, quel qu’il soit, doit retrouver sa gloire d’antan. Certes, cette armée doit disposer d’armements adéquats et bénéficier, dans cette guerre asymétrique qui lui est imposée, d’un service de renseignement affiné.

En tout cas, si les populations sont contraintes, de nos jours, de se constituer en comités de vigilance ou d’auto-défense, qui, du reste, n’ont pas d’existence officielle, c’est bien parce qu’elles ne savent plus à quelle armée protectrice se vouer. Et ça, ce n’est pas à l’honneur d’une armée qui, pourtant, a toujours fait la fierté du Niger, lorsqu’elle se range du côté du peuple. De ce fait, le peuple qui, lui, a le devoir de faire corps avec son armée républicaine, saura également extirper de son sein, les brebis galeuses qui, pour des intérêts égoïstes et très personnelles, se rangent du côté de l’ennemi pour faire couler le sang de populations innocentes.

La naissance de comités d’auto-défense constitués de civils, ignorant tout des techniques de défense et du maniement des armes, est une véritable offense et un grand danger pour l’armée nigérienne. Du reste, les dérives incontrôlables comme cette expédition menée par le désormais Feu le maire de Banibangou qui a viré à l’hécatombe, sont une vive interpellation à l’endroit de l’armée, qui doit reprendre en main, la défense des populations et de leurs biens.

Plus que jamais, le Niger démocratique et engagé sur de nouveaux chantiers du développement, a besoin de s’adosser à une armée républicaine et patriote pour relever le défi sécuritaire, gage de l’amélioration des conditions de vie, et des militaires, et des civils.

Par Wakat Séra