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Pour un concordat entre l’Union africaine et l’Union Européenne

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Dans cet écrit, Serge Samandoulgou pair de la NégroEvolution et Emmanuel Argo, Membre de Chatham House. Royaume Uni. Auteur du concept NégroÉvolution et de la dénomination Africa Mundus, déclare que « l’Union Européenne risque de perdre définitivement les valeurs fondamentales qui ont présidé à sa construction ». Aussi, il est favorable à un « concordat entre l’Union africaine et l’Union Européenne ».

Attaquée de l’extérieur comme à l’intérieur de son propre espace, l’U.E. s’affaiblira sans remise en question et adaptation aux défis actuels, d’autant que, de sa vocation fédératrice initiale, elle est devenue pour beaucoup une banque, un arbitre, un censeur ou un bouc émissaire. Accusée de gestion opaque, de complicité avec les lobbies, accusée d’imposer des règles de concurrence qui affaiblissent ses membres, se mêlant de tout, s’immisçant partout, il semble que le projet d’unir des nations autrefois ennemies ait laissé place à un système déconnecté des peuples, une machine qui divise face aux changements climatiques économiques, sociaux et politiques annoncés.

Parions que, lors des élections prochaines, l’absentéisme l’emportera et les ententes politiques de circonstance n’y changeront rien. Emmanuel Macron qui sent le vent venir anticipe le sujet pour tenter de sauver ce qui peut encore l’être.

La politique africaine de l’Europe :

La majorité des pays européens conservent une mentalité héritée de l’ère coloniale.  Tandis que se perpétuent leurs vieilles méthodes, la Russie, la Chine, le Brésil emploient une toute autre stratégie. Ainsi, le cours des matières premières puisées en Afrique est fixé en Occident ; les États sont ‘‘tenus à la culotte’’ par leurs dettes ; des aides octroyées par des institutions les vassalisent et pour donner bonne conscience, des ONG gèrent ce qui en résulte : la misère, la guerre, les flux migratoires… Peut-on en rester là ?

Á l’heure des prochaines élections européennes, on évoquera l’accueil et la répartition des migrants mais qui abordera le sujet d’un nouveau contrat pour un partenariat équitable avec le continent qui comptera, d’ici 2030, deux milliards d’individus ? Qui dira que les temps changent et qu’à pratiquer toujours et encore le misérabilisme, la négrophobie, le mépris, on passe à côté du changement inéluctable de ceux que l’on ne voit jamais que sous l’angle d’une race moins évoluée, et donc, d’une docilité et servilité ataviques.

En poursuivant cette politique héritée des anciennes pratiques esclavagistes, l’Union Européenne risque de perdre définitivement les valeurs fondamentales qui ont présidé à sa construction. Un de nos amis africains a résumé la situation : ‘‘Imaginez que vos richesses et votre monnaie soient gérées par un étranger qui fixe les cours de vos matières premières, les utilise pour assurer son propre développement, mais vous ferme la porte au nez quand vous venez chercher pitance ’’.

L’élaboration d’un nouveau partenariat Afrique-Europe :

Quand l’Afrique, ses Afro-descendants et diasporas, ce que nous dénommons l’Africa Mundus, s’émanciperont réellement de la tutelle organisée, que deviendra l’Europe ?

Une surdi-mutité embarrassée s’est emparée de la plupart des dirigeants européens concernés  à  l’exception de Luigi Di Maio qui a conspué la France dans sa politique migratoire et ajouté avec raillerie que  le Franc CFA reste le ‘‘Franc des Colonies Françaises’’ . La valeur du Franc- CFA, à parité fixe avec l’euro ,est garantie par le Trésor public français dans le cadre du traité de Maastricht. Pour information, la Banque de France fait imprimer le Franc-CFA à Chamalières, une bonne ville de la province française.

En 2015 , Kako Nubukpo, ministre du gouvernement togolais, critique la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest sur le maintien du Franc-CFA ; puis le président du Tchad Idriss Deby, déclare en substance que le F-CFA doit pouvoir être convertible  et que les anciennes clauses devront être renégociées dans l’intérêt de l’Afrique mais aussi de la France’’ et c’est sans compter cette Convention ACP [Afrique, Caraïbes, Pacifique] – CEE [Communauté Economique Européenne], qui en réalité avantage surtout l’Europe.

Á l’heure où asiatiques, américains, indiens, russes font antichambre pour courtiser l’Afrique, tout peut être possible. Imaginons une hausse subite du cours des matières premières indispensables à l’Europe comme en 1973 lorsque l’OPEP a fixé le cours du pétrole ?

Au moment où les populations européennes refusent une gestion opaque et technocratique et notamment sur la question migratoire, n’est-il pas temps de revoir aussi les accords et autres échanges avec l’Afrique ?  Ce sujet, débattu dans les réseaux de l’Africa Mundus, est soutenu par des NégroÉvolutionnistes qui ont ouvert  le débat aux territoires d’outre-mer européens.  Les réseaux proposent la mise en place d’un concordat économique et sociétal, loyal et enfin équitable, pour construire des partenariats en lieu et place des accaparements actuels, et ce, pour en finir une fois pour toutes avec les échanges hérités du temps de Christophe Colomb et de Vasco de Gama, quand on achetait les sauvages avec de la verroterie.

Pour leur développement, les Afriques rappellent déjà leurs ressortissants dont l’expertise profite à d’autres. Le temps où les autochtones portaient sur leur dos les Européens est révolu. ‘‘L’air du comptez sur nous, fait place à l’ère du comptez avec nous’’, comme semblent l’avoir compris certaines nations qui ne s’embarrassent pas de scrupules et que le pragmatisme, dans un contexte d’ultra libéralisme où tout se monnaie, même les hommes, relève davantage d’une stratégie opportuniste que d’un échange équitable.  Ce concordat juste et équitable que l’Europe doit développer avec ses partenaires africains doit donc être différent du cynisme mercantile des affairistes ; ses termes doivent tenir compte de normes conjointement établies mais jamais imposées.

Compte tenu de l’interpénétration culturelle, des liens historiques, politiques et intellectuels incontestables, l’Europe bénéficie d’un atout certain pour construire avec les Afriques un co-développement bénéfique à tous.