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Sommet de Paris sur les économies africaines: n’est-il pas temps de couper le cordon ombilical?

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L'Afrique, un continent riche de ses richesses naturelles, mais paradoxalement absente du concert des nations (Ph. DR)

Le président français Emmanuel Macron réunit, à Paris, une quinzaine de chefs d’Etat africains, et plusieurs hauts responsables européens, dans le cadre d’un sommet sur la relance de l’économie d’un continent noir, dans sa partie subsaharienne, durement touchée par la pauvreté, et désormais frappée par la pandémie de la Covid-19. Des réflexions seront également menées sur le traitement de la dette des pays africains dans l’espoir de favoriser de nouveaux investissements dans d’autres secteurs productifs de l’économie de ces pays. Un menu alléchant pour lequel les rencontres, dont celles entre les dirigeants africains et les patrons des institutions de Bretton Woods, Kristalina Georgieva du Fonds monétaire international (FMI) et Axel Van Trotsenburg, de la Banque mondiale, ont servi de menu, depuis ce dimanche, en attendant le plat de résistance de ce mardi.

Une fois de plus, capés de leur soixantaine d’années d’indépendance, ils vont tous s’asseoir pour écouter, dans une religiosité obséquieuse, le grand sachem français qui avait pourtant juré d’instaurer de nouveaux paradigmes dans les relations entre la France et ses «partenaires» africains. Comme quoi, la Françafrique a la peau bien dure. A quand les solutions africaines, trouvées aux problèmes africains, par les Africains, en Afrique? Cette interrogation qui triturait les méninges de Joseph Ki-Zerbo, et restée jusque-là sans véritable réponse, demeure d’actualité, malgré la disparition, depuis 15 ans, du célèbre historien et homme politique burkinabè. En tout cas, si le salut des Africains devait venir de la France, il y a fort longtemps que des concepts comme développement et émergence, ne seraient plus des slogans creux, criés sans conviction par des dirigeants africains, soucieux, en réalité, pour la plupart, de la conquête et de la conservation de leurs fauteuils.

Les dirigeants africains, pourtant entourés de brillants conseillers, qu’ils ne voient qu’une fois l’an, en l’occurrence, le jour de la présentation des vœux, sont-ils réellement autant en panne de solutions pour se retourner, toutes les fois, vers une France qu’ils cloueront au pilori, dès que leurs peuples grognent contre la mainmise de l’Occident sur les richesses nationales? S’ils sont autant aptes à répondre au tocsin sonné depuis l’Elysée, à des milliers de kilomètres de l’Afrique, pourquoi ne privilégient-ils pas des solutions endogènes, réunis sous l’arbre à palabres africain, où l’union devrait faire la force contre les adversités, qu’elles soient économiques ou sanitaires? Non, chacun préfère se mettre sur son 31, pour être reçu par le président français et en mettre plein la vue à des peuples qui pataugent dans la gadoue de l’obscurantisme, de l’insécurité et de la maladie.

Qu’attendre de ce «New Deal de l’Afrique»? Certainement pas grand-chose!  Car le diagnostic du mal dont souffre «Maman Afrique» est connu et se décline en plusieurs maladies dont les plus graves sont, la mal gouvernance, la corruption, le népotisme, la présidence à vie et la sclérose de la classe politique incapable de proposer des «new deal» aux peuples. Seul le remède est donc difficile à appliquer, car nécessitant un traitement de choc pour lequel les dirigeants africains ne sont pas prêts. Il leur faut donc, toujours s’accrocher à la France tel un cordon ombilical qui relie un bébé à sa mère. Bien entendu, l’ancienne colonie qui défend aussi ses intérêts se plait bien dans ce jeu de «tu me tiens, je te tiens par la barbichette».

Du reste, la source du marasme économique de l’Afrique, n’est pas que le fait de la crise de la pandémie du Covid-19. Ce n’est que le bouc émissaire. Rien que l’écart entre la rigueur avec laquelle le Covid-19 sévit en France et la clémence dont il fait preuve en Afrique, devrait faire réfléchir les dirigeants africains. Une Afrique immensément riche en ressources naturelles, en matières premières, mais qui reste, paradoxalement, il faut le dire sans pudeur, le continent le plus pauvre et le moins présent dans le concert des nations, si ce n’est pour se ranger derrière les pays dits puissants, lors des discussions aux Nations Unies.

Comme le dit si bien le reggaeman  ivoirien Ticken Jah Facoly, «personne ne viendra sauver l’Afrique à notre place». La clé du développement de l’Afrique n’est, pour ainsi dire, nulle part ailleurs si ce n’est entre ses propres mains. Qu’ils s’appellent France, Chine ou Etats-Unis, aucun pays ne pourra développer l’Afrique. Bien que n’étant pas l’exemple de président à citer, Donald Trump le disait judicieusement, «l’Amérique d’abord». N’est-il pas temps de chercher à clamer aussi, «l’Afrique d’abord»? Comme l’affirmait, de son vivant, le Professeur Joseph Ki-Zerbo, «on ne développe pas, on se développe».

Siaka CISSE (stagiaire)